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    Layla M, au coeur d’une problématique actuelle

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    Layla M

    de Mijke de Jong

    Drame

    Avec Nora El Koussour, Ilias Addab

    Sorti le 23 novembre 2016

    A première vue, Layla est une jeune adulte comme les autres : elle joue au foot, attache de l’importance à ses amis et ses études et a grandi dans une famille aimante. Mais Layla, tiraillée entre la nationalité hollandaise dont elle bénéficie et la foi musulmane qui l’habite, est en proie à une profonde crise identitaire et se sent finalement très différente des autres. De plus en plus convaincue de vivre dans une société qui la rejette, Layla se lie d’amitié aux membres d’un groupuscule islamiste et s’amourache même d’un jeune partisan. Finalement, radicalisée, elle se rend, accompagnée de ce garçon avec qui elle s’est mariée entre-temps, au Moyen-Orient où elle découvre l’envers du décor.

    C’est un travail très délicat auquel se sont attelés Mijke de Jong et Jan Eilander en choisissant de traiter d’un sujet qui fait aujourd’hui polémique. Relater l’embrigadement d’une jeune européenne nécessite à la fois de se renseigner minutieusement, mais également de se dépourvoir de tous stéréotypes faciles afin d’éviter les amalgames malheureuses. Et force est de constater que Layla M a relevé le défi avec succès.

    La réalisatrice, soutenue par son mari, a d’abord pris le temps de bien définir les caractères et motivations de ses personnages qui ne répondent pas, soit dit en passant, au cliché trop facile que pour se vérifier du jeune musulman docile, peu éduqué et issu des quartiers ghettos. Layla n’a, en effet, pas sa langue dans sa poche et, révoltée devant la situation du peuple palestinien, elle décide de lutter contre toute forme de violence. Certaine d’agir de la bonne manière, Layla se radicalise non pas parce que, trop vulnérable, elle se laisse embrigadée, mais bien parce que, de sa propre volonté, elle désire se battre contre le racisme et surtout les injustices. Et puisque le bien se trouve dans le Coran, il est évident que ce combat doit être mené en Syrie ou en Palestine et cela dans le but, pour elle, de pouvoir vivre heureuse dans un monde de paix auprès de personnes qui partagent sa foi. Issue d’une famille aux valeurs libérales, l’ambiance devient de plus en plus tendue à la maison. Layla se rebelle très vite contre ses parents mais aussi contre son frère, ou encore sa meilleure amie qui ne semblent pas comprendre ses choix.

    Le personnage d’Abdel paraît également être le fruit d’un travail d’investigation laborieux. Il est plus réservé et plus influençable que Layla. D’ailleurs, là où sa jeune femme voit la foi comme un instrument pacifiste, Abdel, quant à lui, l’interprète comme une valeur pour laquelle il faut être prêt à sacrifier des vies. Mijke de Jong nous dresse donc, ici, le portrait de deux jeunes diamétralement opposés et pourtant concernés par les mêmes problèmes. Mais la liste des situations qui peuvent pousser un jeune à s’engager dans le djihad, de quelque manière que ce soit, n’est pas exhaustive. Ce film n’a donc pas la prétention de révéler la Vérité, avec un grand V, mais bien d’imaginer une histoire qui peut, ou qui aurait pu, arriver à certains jeunes. D’ailleurs, Mijke de Jong nous propose d’autres portraits de djihadistes et de jeunes radicalisés, de tous les horizons.

    Face à la complexité non seulement de la construction des personnages mais également de leurs relations, on ne peut qu’admirer les interprétations de la très jeune actrice Nora El Koussour et de Ilias Addab qui forcent l’admiration, mais aussi celles des seconds rôles.

    Layla M refuse le sens commun selon lequel il y a d’un côtés les bons occidentaux victimes des attentats et de l’autre les mauvais terroristes car, dans ce monde où règne l’incompréhension, chacun des deux camps attisent la violence de l’autre. Et Mijke de Jong nous dresse, d’une part, le tableau d’une Europe qui peine à adopter le bon comportement face à cette situation et, d’autre part, celui d’une région dévastée par la guerre et la barbarie. Par le message qu’il véhicule, ce film parvient à humaniser ceux que l’on considère comme les ennemis publics numéro un, sans pourtant les innocenter. Layla M est donc un très beau film qui invite à méditer des thèmes, non seulement, politiques et idéologiques, comme le djihadisme, mais également sociaux et philosophiques tel que le passage douloureux à l’âge adulte ou encore la relation ambiguë entre ce qui est juste et ce qui ne l’est pas.

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