La Voleuse de livres
de Brian Percival
Drame
Avec Geoffrey Rush, Emily Watson, Sophie Nélisse
Sorti le 26 mars 2014
Critique :
L’histoire suit Liesel Meminger, une petite fille envoyée avec son frère dans une famille d’accueil allemande afin de fuir les persécutions nazies. Son frère meurt pendant le trajet et Liesel se retrouve confrontée seule à sa nouvelle famille dont le père, Hans Hubermann, est d’une attention toute particulière envers la jeune fille alors que la mère est plutôt acariâtre et désagréable. Plus tard, c’est au tour de Max, le fils juif d’un ancien camarade de tranchées de Hans, de venir frapper à la porte des Hubermann. Cachés dans un coin de la cave, les deux acolytes vont alors rêver de jours meilleurs, notamment à travers les livres que Liesel arrive à se procurer.
Le réalisateur britannique Brian Percival nous était jusqu’ici inconnu. Cependant, l’histoire de La Voleuse de livres écrite par l’Australien d’origine autrichienne et allemande Markus Zusak, nous était plus familière puisqu’elle fût un best-seller en 2007. Un succès retentissant pour un récit à double lecture, celle de la relative insouciance de la jeunesse face à la guerre et celle de la dure réalité de la vie sous le régime nazi. Et oui, certains ont tendance à l’oublier, mais de nombreux Allemands ont également souffert de la tyrannie hitlérienne. La pression sur les épaules de Brian Percival était donc grande et le résultat nous a laissé plutôt perplexes.
De fait, même si la mise en scène est propre, les acteurs charismatiques et la transposition fidèle au roman (même si certains faits ou personnages manquent à l’appel), le récit laisse un peu de côté son aspect le plus original, son narrateur. Et pour cause, même si le spectateur le comprend au fil de l’histoire, la Mort est la seule écrivaine de ce récit. À travers ses yeux et ses interrogations, on aperçoit toute l’horreur de la guerre, de la Shoah, de l’anti-bolchévisme. Comme des pions ou des marionnettes articulées, la Mort joue avec ses personnages que sont, entre autres, Liesel et Max. Un angle de vue inédit que l’on ne perçoit que de manière secondaire dans la réalisation de Brian Percival.
Hormis cela, l’histoire se laisse suivre attentivement passant aisément de la haine à l’amour, de la joie à l’horreur, sans pour autant tomber dans le pathos pur et simple. L’idylle amicale entre Liesel et le jeune Rudy, symbole malgré lui de la race pure allemande, est à bien des égards riche en enseignements. Une opportunité de voir un autre visage de l’Allemagne pendant la guerre.
Mais, mis à part l’histoire en elle-même, le bât blesse quant à un choix de la réalisation que nous avons eu difficile à avaler, les dialogues en anglais. Cela peut paraître totalement saugrenu de tenir de tels jugements au regard d’autres films qui ont jadis usurpé la linguistique de l’Histoire comme Troie ou encore 300 dernièrement, mais La Voleuse de livres se veut être un drame proche de la réalité et donc du cheminement logique de l’Histoire. Pourquoi avoir dès lors affublé nos personnages d’un accent anglais improbable alors qu’ils sont allemands ? Et, même si l’on occulte cela, pourquoi alterner l’allemand et l’anglais ? Par extension, pourquoi nous présenter une couverture de livre en allemand et y voir à l’intérieur un texte en anglais ? C’est totalement absurde et dénué de bon sens.
En résumé, La Voleuse de livres reste une belle histoire sur la mort régnante durant la guerre et dont elle est la narratrice exclusive. Néanmoins, du point de vue de la réalisation, certains oublis et certaines errances la desservent entièrement.