Le Garçon et la Bête
de Mamoru Hosoda
Animation, Aventure
Sorti le 16 mars 2016
Suite au décès de sa mère, Ren, 9 ans, décide de s’enfuir pour ne pas avoir à vivre avec des membres lointains de sa famille, desquels il ne se sent pas proche. C’est dans une ruelle qu’il fait la rencontre de Kumatetsu, un ours combattant tout droit venu de Jutengai, un monde peuplé d’animaux anthropomorphes. Kumatetsu se devant de trouver un disciple pour ne serait-ce que pouvoir prétendre à la succession du Seigneur de Jutengai, il propose alors au jeune enfant, qu’il renomme Kyuta, de le suivre.
Après le très réussi Les enfants loups, Ame et Yuki, Mamoru Hosoda s’intéresse à nouveau à un récit d’émancipation au long cours, qui revêt cette fois-ci des atours plus classiques. D’autant que le long-métrage semble s’être construit en partie en mêlant plusieurs folklores asiatiques. Kyuta peut ainsi faire penser au très populaire Kintaro, un enfant issu du folklore japonais qui, marqué par une force herculéenne, a grandi en forêt et est devenu l’ami des animaux qui la peuplent, tandis que les acolytes de Kumatetsu renvoient directement au roman chinois Le voyage en Occident, et en particulier à Sun Wukong (le célèbre Roi des Singes) et Zhu Bajie (un cochon d’apparence humaine). Sans compter que, dans sa première partie, Le garçon et la bête s’inscrit dans la droite lignée des films d’arts martiaux centrés sur l’apprentissage, dont l’emblématique La 36ème chambre de Shaolin.
Néanmoins, la patte du réalisateur/scénariste n’en est pas pour autant atténuée. Ici, l’enseignement ne se fait pas uniquement de maître à élève, mais se construit au contraire autour de la réciprocité. Si Kumatetsu apprend bel et bien son art du combat à Kyuta, il bénéficiera également des découvertes de ce dernier. Le réalisateur semble souligner par ce fait que l’éducation d’un enfant ne se fait pas à sens unique mais repose plutôt sur un système d’échange mutuel, duquel chacun ressort grandi en accédant à plus de maturité. En résulte une caractérisation subtile des personnages, majoritairement basée sur des échanges tantôt amusants et tantôt touchants entre un maître bourru et un élève borné, qui verront peu à peu évoluer leur relation.
L’émotion est également appuyée par un mélange entre éléments fantastiques et scènes du quotidien, part non négligeable du style de Mamoru Hosoda depuis La traversée du temps. Au lieu de simplement se contraster, ces scènes cohabitent au sein d’un tout cohérent et n’hésitent pas à se répondre. Jutengai finira ainsi par entrer en résonance de manière presque naturelle avec le monde tel que nous le connaissons, représenté par le quartier tokyoïte de Shibuya.
Le passage à l’âge adulte du héros, et le vide intérieur qu’il doit apprendre à combler, au propre comme au figuré, ne se fera pas simplement pour autant, la voie qu’il a choisi n’étant pas sans embûches. Ce qui donne lieu à des affrontements impressionnants et que vient préciser un antagoniste, dont l’impact se fait de manière tardive mais non dénuée de sens, et qui justifie à lui seul un final spectaculaire mais somme toute logique.
Grâce à son équilibre maîtrisé entre action et sentiments, relayé par le rythme du film qui sait se faire rapide, mais également laisser la place à quelques respirations, et à son message porteur d’espoir, Le garçon et la bête s’avère être une réussite. Une de plus à mettre au service de son réalisateur, amené à devenir un grand nom de l’animation. Si ce n’est déjà fait.