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    Mousseline la Sérieuse de Sylvie Yvert

    Mousseline la Sérieuse

    auteur : Sylvie Yvert
    édition : Héloïse d’Ormesson
    sortie : février 2016
    genre : histoire

    En 1778 naît Marie-Thérèse-Charlotte de France, premier enfant tant attendu après 7 années de stérilité du couple royal formé par Louis XVI et Marie-Antoinette. Si elle n’est pas l’héritier mâle indispensable à la perpétuation de la dynastie régie par la loi salique, elle n’en reste pas moins choyée et vivra une enfance heureuse dans les fastes de la cour de Versailles.

    Mais le 14 juillet 1789, tout bascule. La Révolution française balaie la monarchie en place depuis 8 siècles d’un revers de baïonnette. Le monde de la famille royale s’effondre et Marie-Thérèse se rend compte avec effroi que les parents qu’elle adore sont honni de tout un peuple, celui-là même dont le bonheur était pourtant le premier de leur souci et qu’ils s’étaient toujours juré de protéger. La famille est contrainte de s’installer au palais des Tuileries sans cesse la proie des quolibets et autres insultes proférées par les révolutionnaires et constamment sous surveillance jusqu’à cette nuit fatale de leur fuite à Varennes qui manqua de peu de réussir n’étant une suite de concours de circonstances malheureux.

    Après cet épisode, le peu de crédit que la famille royale conservait encore fut anéanti. C’est dans ces conditions qu’ils retournèrent à Paris pour être transférés à la prison du Temple, cet imposant donjon médiéval insalubre et étouffant. Pendant les 3 ans, 4 mois et 5 jours que dura sa captivité, rien ne sera épargné à Marie-Thérèse. Elle sera tour à tour séparée de son père, de son jeune frère, de sa mère – dont elle ignorera la mort durant plus d’un an et demi – et enfin, de sa tante. Orpheline sans le savoir, elle restera prisonnière après la perte des siens, totalement abandonnée dans son cachot humide et infesté de vermine sans même avoir de quoi se chauffer, sans qu’aucun de ses geôliers ne lui adresse la parole à tel point qu’elle en perdit la faculté de parler.

    La première (et majeure) partie du livre est consacrée à la chute de la monarchie, à la captivité jusqu’à la libération de la prison du Temple. Raconté par une vieille dame de 73 ans qui au crépuscule de sa vie se décide enfin à coucher sur le papier cette expérience atroce, comme si la destinée funeste dont elle échoit était devenue trop lourde à porter. Si les premiers épisodes sont connus et ont été abondamment explorés et analysés de fond en comble, l’intérêt principal de Mousseline la Sérieuse réside notamment dans le fait que l’on fait parler un témoin qui a toujours refusé de le faire, allant même jusqu’à faire disparaître toute sa correspondance dans le seul souci de ne faire de mal aux personnes (ni à leurs descendants) par les mots qu’elle aurait pu avoir à leur endroit.

    La deuxième partie du livre est consacrée à la vie de celle qui devient par son mariage avec son cousin (fils du comte d’Artois, frère cadet de Louis XVI et futur Charles X) la Duchesse d’Angoulême, la faisant entrer du même coup dans l’ordre de succession à la couronne de France. Lorsque son oncle Charles X abdique, son mari deviendra Louis XIX et elle reine de France. Mais seulement pour quelques minutes puisque celui-ci abdique également en faveur de leur neveu Henri V, comte de Chambord. Marie-Thérèse aura une vie faite d’errances et d’exils traversés de très furtifs rayons de soleil. Elle connaîtra trois règnes suivis de trois révolutions qui entraînèrent trois exils. Elle s’éteindra en Autriche sans avoir pu revenir sur le sol de sa chère France et sans savoir si son neveu, sur qui elle fondait tant d’espoirs, accéderait un jour au trône. La postérité nous apprendra qu’il n’en fut rien.

    Quel destin que celui de cette femme brisée dans son enfance mais droite et énergique détestant la foule à cause de sa trop grande timidité trop souvent prise pour de l’indifférence. Un récit poignant qui prend place dans les moments les plus sombres de l’histoire de France en pleine mutation où l’on assiste aux dernières convulsions d’une monarchie dépassée et désuète. Deux mondes en totale contradictions qui mèneront cette institution séculaire à sa perte. Mousseline la Sérieuse est un premier roman très réussi.

    Daphné Troniseck
    Daphné Troniseck
    Journaliste du Suricate Magazine

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