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    Le Meilleur des mondes d’Aldous Huxley

    Le Meilleur des mondes

    auteur : Aldous Huxley
    édition : Audiolib
    sortie : juillet 2015
    genre : dystopie

    En 1931, Aldous Huxley rédigeait en quatre mois ce qui allait devenir une des plus célèbres dystopies de la littérature anglaise : Le meilleur des mondes. Dans ce roman d’anticipation, Huxley décrit une société totalitaire où le divertissement de masse assure l’asservissement des consciences. Dans cet Audiolib, guidé par la passion et la voix grave de Thibault de Montalembert, le lecteur découvre que, le futur, c’est maintenant.

    En l’an 632 de Notre Ford, il n’y a plus de guerre, plus de religion; on ne tombe pas plus malade qu’on ne décrépit ; il n’y a plus aucune contrariété et s’il en survenait malgré tout, le soma, une drogue sans aucun effet secondaire, pallie les occasionnels malaises. L’amour et ses passions sont abolis, tout un chacun appartient à tout le monde, tandis que la parentalité est une obscénité du passé. Désormais, les humains sont produits à la chaine via un procédé in vitro ; ils sont conditionnés à la fois physiquement et psychologiquement à servir la société selon leur caste. Dans ce monde-là, le meilleur, les individus aiment leur servitude.

    Aldous Huxley est souvent confondu avec Georges Orwell, auteur de Animal Farm et 1984, tant la mention de l’un appelle celle de l’autre. Ces deux anglais ont mis en scène à leur manière l’évolution – les dérives – de nos sociétés occidentales modernes. Là où Orwell prophétisait une humanité mise en laisse par la peur, via le contrôle et la surveillance, Huxley prédisait sa mise au pas par ce qui la divertit. Et force est de constater que les prédictions de l’un et l’autre ont perdu leur caractère futuriste quand on considère le pouvoir que nous avons donné à des géants comme Google, Facebook ou Apple (pour ne citer que la pointe de l’iceberg) en leur livrant des données privées, autant de moyens de contrôle en échange de services gratuits aussi distrayants qu’avilissants.

    Les plus rompus aux vers shakespeariens apprécieront la place prédominante du maître anglais dans l’oeuvre de Huxley. Le principe même du livre repose sur les paroles de Miranda dans la pièce de théâtre The Tempest. Élevée isolée de la société, la jeune fille s’émerveille candidement du nouveau monde qu’elle découvre, alors même qu’elle est confrontée au rebut de l’humanité. Or ce sont les mots de Miranda que reprend, d’abord avec méfiance, puis avec dégoût, John, « le Sauvage », tiré d’une réserve et plongé dans cette civilisation post-fordienne aseptisée et pleine d’anti-héros. Car dans le « nouveau monde » de Huxley, justement inspiré par un voyage aux Etat-Unis, ce qui prime, c’est la stabilité : « Il est impossible d’avoir quelque chose pour rien. Le bonheur, il faut le payer ». Quitte à sacrifier la science, la beauté et la (recherche de) vérité.

    À livre culte, lecteur prestigieux : c’est l’acteur, comédien et grand amateur de littérature Thibault de Montalembert qui prête sa voix au roman de Huxley. Pour les plus assidus, cette voix évoquera Hugh Grant, voire Antonio Banderas, deux acteurs que Montalembert a déjà doublé. À voir s’il lira un jour Retour vers le meilleur des mondes, un essai publié en 1958 dans lequel Huxley constate que le monde a effectivement, et plus rapidement que prévu, évolué selon ses pronostics.

    Le Meilleur des mondes est à lire. Parce que certaines anticipations d’alors sont devenus des réalités d’aujourd’hui ; parce que plus que jamais, il ne faut pas laisser notre liberté et notre discernement s’endormir sur l’autel du confort et de la sécurité. Pour autant, Huxley n’intègre pas des composantes devenues déterminantes pour l’humanité, à commencer par la révolution pour l’égalité des sexes ou la finitude de notre planète. Ainsi donc, s’il semble sain de se rappeler les prévisions de Huxley, il est tout aussi utile de considérer que son livre n’est pas un épilogue, tant s’en faut.

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