Maryland
d’Alice Winocour
Drame
Avec Matthias Schoenaerts, Diane Kruger, Paul Hamy, Victor Pontecorvo
Sorti le 30 septembre 2015
Après un premier long métrage avec Vincent Lindon – Augustine, en 2012 – et parallèlement à son travail de scénariste sur Mustang de Deniz Gamze Ergüven, la jeune cinéaste Alice Winocour convie, pour son deuxième long, Matthias Schoenaerts et Diane Kruger à un quasi huis-clos dans Maryland.
Soldat traumatisé par son récent passage en Afghanistan, Vincent accepte un petit boulot de sécurité en attendant désespérément d’être renvoyé au front. Chargé de protéger la femme et le fils d’un marchant d’armes dans la villa cossue de ce dernier, il croit déceler une présence qui guète la maison et ses occupants. Mais entre paranoïa post-traumatique et réel danger, Vincent a du mal à démêler le vrai du faux. Jusqu’à ce que la menace se concrétise….
Le parti-pris de la réalisatrice – et qui semble être le même que chez bon nombre d’auteurs français en ce moment : Audiard dans Dheepan, Brizé dans La loi du marché – est de suivre de très près son personnage principal, de coller la caméra à son point de vue, afin de créer l’immersion totale du spectateur. Le choix de Matthias Schoenaerts pour incarner Vincent n’est pas anodin car la masse physique qu’il représente permet encore plus d’occuper la place et de fermer l’espace du cadrage sur sa seule personne. Si l’on peut déplorer le fait que l’acteur soit un peu trop systématiquement employé dans ce genre de rôles finalement très monolithiques et stéréotypés, il faut reconnaître qu’il y excelle.
En centrant le film sur ce personnage et son acteur, Alice Winocour crée donc une approche précise – sans non plus toucher à la radicalité – de la mise en scène, appliquée à un scénario finalement assez basique, qui pourrait tout aussi bien être celui d’un film d’action décérébré. Paradoxalement, c’est ce qui est le plus intéressant dans le film : cette épure dramaturgique réduite au ressenti de l’« action hero ». En quelques mots, Maryland est un film d’action subjectif, dans lequel la maigreur de l’enjeu – protéger son territoire, survivre – permet de mettre l’être humain au premier plan et de guetter ses réactions et ses soubresauts.
Cette démarche rend en un sens le film assez déceptif car il s’oriente vers un but clair et basique, en ne s’encombrant pas trop de pistes narratives secondaires qui, si elles sont bel et bien esquissées – une éventuelle romance entre le garde du corps et sa protégée, la complicité passive de celle-ci avec son mari marchand d’armes –, ne sont jamais développées. Alice Winocour livre en cela une œuvre aussi brute de décoffrage que son personnage principal. Ce n’est ni un film à sujet, ni un film de scénario, tout simplement un film d’action, de ressenti. Et cette épure du fond favorise pleinement la forme, aidant Maryland à trouver son identité : celle d’un film peu aimable mais direct et sans fioritures.