En avril dernier, D’jal débarquait au W:Halll de Woluwe-Saint-Pierre dans une salle comble. C’est bien simple, les organisateurs ont dû cloturer la vente des billets très tôt. Pourtant, l’humoriste français n’est pas une star du rock ou la vedette d’une émission Disney Channel. Alors que peut bien cacher ce personnage qui enchante les spectateurs avec son célèbre sketch du « Portugais » ?
Pour répondre à cette question, nous sommes partis à sa rencontre.
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Vous souhaitiez à la base faire du cinéma ?
Oui, c’est vrai. Mais je me suis vite rendu compte que c’était difficile, long et qu’il fallait être patient. Comme j’étais plutôt quelqu’un d’impatient, je me suis dirigé vers l’humour et plus particulièrement le stand-up.
Vous avez pourtant réalisé un film ?
J’ai réalisé un court métrage. J’y ai pris énormément de plaisir. Même si ce n’est pas le plus beau court métrage de la Terre, cela m’a permis d’apprendre et de rencontrer des gens formidables.
Ce que j’aime avant tout, c’est créer.
Cela dit, j’ai le privilège de pouvoir dire aujourd’hui que l’année prochaine je jouerai dans un grand film. J’y incarnerai l’acteur principal mais je co-écrirai également le scénario.
Comment avez-vous dévié vers le stand up ?
C’est justement lorsque j’ai fait ce court métrage. Dans celui-ci, il y avait des gens du métier qui me disaient de mettre sur un bout de papier tout ce qui me passait par la tête et d’aller sur scène avec ça.
C’est ce que j’ai fait.
De là est né Just D’jal, un spectacle où vous racontez votre vie en incarnant des personnages hauts en couleurs…
Je pense que le fil conducteur du spectacle, c’est moi. Ce spectacle reflète ce que je suis, ceux que j’ai croisés et les personnages que j’avais envie de créer. C’est d’ailleurs dans notre culture – belge ou française – d’incarner des personnages et de faire des sketchs.
J’adore incarner des personnages incroyables comme l’ont fait Les Inconnus ou Dieudonné avant moi… avant qu’il ne devienne Belzébuth.
©Rebecca Josset
Vous attendiez-vous à un succès si rapide ?
En vérité ? Non (rires). Pour la bonne raison que je n’ai pas travaillé mes sketchs en fonction de ce que les gens attendaient, mais plutôt en fonction de ce que j’étais capable de faire. L’actualité ne m’intéressait pas, mais parodier les différents accents ou les différentes cultures, ça me tentait bien.
Cela est probablement dû au fait que durant toute ma jeunesse, j’ai entendu de nombreux accents autour de moi. Puis, je voyage beaucoup, que ce soit en Europe, en Afrique, au Moyen-Orient ou même aux Etats-Unis, où je jouerai d’ailleurs dans les prochains jours (ndlr : le 15 septembre à New-York et le 17 septembre à Miami).
Vous parlez beaucoup de vos parents dans votre spectacle. Même si c’est sur le ton de la blague, avez-vous une réelle nostalgie face à vos origines ?
Un jour, une directrice de théâtre est venue gentiment me dire qu’elle ne comprenait pas pourquoi les humoristes maghrébins avaient toujours besoin de parler de leurs familles et de leurs origines.
Je la comprends. Mais d’un autre côté, on sait quel a été leur parcours et la douleur du déracinement. On sait que cela a joué un rôle dans le fait que certains pères étaient durs et renfermés sur eux-mêmes. Derrière cela, il y a beaucoup de tristesse.
Hormis cela, je parle de ma mère car c’est une femme tellement gentille que la rendre méchante dans mes sketchs apportait quelque chose de jouissif. Une mère cruelle qui est prête à tout pour tuer son mari, je trouve ça délirant.
Vous avez déjà joué votre spectacle en Belgique et vous y revenez peu de temps après, le 24 novembre au Cirque Royal, le 1er décembre au Forum de Liège et le 22 mars 2016 à la Maison de la Culture d’Arlon. Quel regard portez-vous sur ce pays ?
Les Belges sont trop gentils et ça m’énerve. (Rires)
Vous n’avez pas de barrière dans votre tête. Alors qu’en France, les gens ont une appréhension par rapport à l’artiste qui arrive sur scène, les Belges s’en foutent, ils sont là pour se marrer.
J’ai l’impression que dans ce pays, on peut raconter la pire des nouvelles et les gens la prennent avec légèreté. Vous profitez de la vie et j’aime ça.
Vous parliez de vos voyages en Afrique, où vous avez par ailleurs présenté votre spectacle. Avez-vous du vous adapter ?
Oui, comme à chaque fois. Leur perception de la France n’est pas la même que la nôtre.
Pour eux, c’est ce qu’ils voient à la télé. Il trouve la France extraordinaire et ne comprenne pas tout à fait les problèmes qu’elle peut engendrer.
L’Afrique m’a beaucoup appris, notamment à relativiser et à comprendre la chance que j’ai.
Le grand public vous a découvert via le sketch du « Portugais ». Ce personnage vous dessert-il aujourd’hui ?
(Rires) Non. J’aime ce personnage et je lui dois ma place aujourd’hui. Je continuerai à le faire autant que je le pourrai. Et puis, chaque humoriste recherche son hit, le personnage ou le sketch que le public reconnaitra tout de suite.
Après, dans mon spectacle, il y a de tout. Je parle de ma mère, de ma grand-mère, d’un cocaïnomane sud-américain, des insectes, de mes voyages, du ramadan, de la religion, etc.
Maintenant, je peux comprendre que certaines personnes soient lassées d’entendre ce sketch. À l’instar d’une chanson que t’adores mais que tu as trop écoutée, à un moment, t’as envie de buter le chanteur même si t’as sa photo dans ta chambre.
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Propos recueillis par Matthieu Matthys