Photo d’illustration © Isabelle de Beir
Le Tartuffe ou L’Imposteur
De Molière
Mise en scène : Monique Lenoble avec Nicole Colchat, Angelo Bison, Laurence d’Amelio, Bernard Sens, Alexandre von Sivers, Catherine Grosjean, François Maquet, Nathan Fourquet-Dubart, Sarah Messens et Adrien Drumel
Du 6 mars au 5 avril 2014 au Théâtre Royal du Parc
Tartuffe, l’imposteur par excellence… On l’admire et on le déteste à la fois, on voudrait le croire et le chasser, on le défend et on le rejette ; tel est le tableau que l’on peut dépeindre de ce sophiste se jouant des mots pour atteindre tous ses buts. Le dévot par excellence s’impose et creuse son nid jusqu’à vider complètement le peu d’indépendance qu’il reste à l’esprit de ses hôtes.
Orgon est un bourgeois qui s’entiche de Tartuffe. La dévotion extrême dont fait preuve ce dernier convainc le maitre des lieux de lui accorder sa confiance et sa conscience. Il n’y a rien que le maitre ne fasse sans s’enquérir de son cher Tartuffe et en prendre des nouvelles. Il occupe de plus en plus de place dans son esprit au détriment de sa famille et finit même par occulter ses derniers aux yeux d’Orgon. Plus rien ne compte pour lui à part Tartuffe, qui use et abuse de l’autorité qu’il parvient petit à petit à instaurer sur le patriarche. Mais Tartuffe a plusieurs failles et notamment celle de vouloir séduire la maitresse des lieux, ce qui fissurera peu à peu le masque du dévot intouchable qu’il s’est construit. Ne supportant plus l’imposture et l’influence exercée par Tartuffe sur son mari, Elmire élabore un stratagème afin de révéler à son mari du subterfuge dont il est le jouet. Mettant en jeu sa vertu, elle tente le tout pour le tout dans le but de faire tomber ce masque et détrôner l’imposteur.
Il faut ici saluer l’interprétation fournie par Angelo Bison qui nous livre un Tartuffe plus vrai que nature, plein de sincérité et de dévotion. Ce personnage impassible n’a que faire des déboires qu’il occasionne et ne ressent pas d’états d’âme. On en vient progressivement à véritablement haïr cet homme et à ne plus pouvoir accepter ces perfidies verbales. Toujours aussi impassible, il déstabilise et renverse l’ordre établi. Ayant réponse à tout, il contredit et renchérit sans cesse. Catherine Grosjean interprète une Dorine, servante plus qu’impertinente, qui ne mâche pas ses mots et tente de déstabiliser son maitre afin de lui faire entendre raison. Son personnage s’impose rapidement sur la scène et son interprétation pleine de vigueur ne manquera pas d’être remarquée par le spectateur. Alexandre von Silvers en Orgon est un parfait benêt qui refuse d’ouvrir les yeux sauf quand il est trop tard.
Bien qu’écrite en alexandrin, la pièce est relativement bien compréhensible et fait preuve d’un réel dynamisme relayé par les mouvements scéniques. Les entrées et sorties des acteurs s’effectuent par de multiples portes dérobées tout autour d’une rotonde symbolisant très certainement la pièce centrale. Chaque ouverture laisse apparaitre un univers représentatif d’une pièce de la maison en particulier. Le hall central sobre et dégarni contraste avec le foisonnement de détails garnissant chacune de ces alcôves.
Humour, perfidie, manipulation, dévotion, amour, honneur ou encore aveuglement sont mis en scène avec brio. À cela s’ajoute la qualité des costumes, du décor et des acteurs qui nous font revivre ce classique avec beaucoup de talent.