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    Orphelins au Poche

    De Dennis Kelly, mise en scène de Patrice Mincke assisté de Melissa Leon Martin, avec Anne-Pascale Clairembourg, Itsik Elbaz, Pierre Lognay et, en alternance: Sam Bracco, Kasper Holte Nielsen, Lukas Collet, Charlie Goslain et Sacha Bendjilali

    Du 24 mars au 11 avril 2015 à 20h30 au Théâtre de Poche

    Danny et Hélène forment un jeune couple bien comme il faut. Ils incarnent la réussite sociale, le confort, les belles apparences. Ce soir-là, ils avaient prévu un petit dîner en amoureux dans leur appartement cosy lorsque Liam, le frère d’Hélène, débarque sans crier gare, couvert de sang des pieds à la tête. Le couple tente de comprendre ce qui lui est arrivé, mais Liam est encore sous le choc de sa mésaventure. Ses explications sont confuses voire même incohérentes. Le couple – Danny particulièrement – flaire le mauvais coup.

    La conversation du trio se prolonge, révélant peu à peu certaines zones d’ombres jusque là insoupçonnées. La tension monte rapidement. Liam, qui prétendait d’abord avoir voulu aider quelqu’un de blessé, admet à présent être lui-même l’auteur de ses blessures. En continuant à creuser, le couple découvre bientôt tout l’étendue de la réalité. Liam a torturé un Arabe. Hélène et Liam auraient sans doute mieux voulu ne rien savoir mais il est trop tard à présent, impossible de faire marche arrière : il faut agir. Hélène, très émotive, préfère protéger son frère peu importe les risques encourus, peu importe l’immoralité de sa démarche. Danny, plus raisonnable, aimerait mieux se décharger de l’affaire en appelant la police, mais ce coup fil mettrait fin à sa relation amoureuse… Au centre de ce dilemme, une question se pose avec insistance : auraient-ils réagi différemment si la victime n’avait pas été arabe, si elle avait été « l’un des leurs ? »

    Le drame est prétexte à faire ressurgir le passé de chaque personnage, un passé que chacun aurait préféré enfouir mais qui remonte inlassablement vers la surface. Hélène et Liam, orphelins, ont vécu une enfance difficile. Liam a des antécédents de coups et blessures. Danny s’est récemment fait agresser par une bande de gamins d’origine immigrée. Comment retrouver la sérénité dans une société bousculée par tant de violence et de délinquance ? Hélène en vient même à se demander si elle souhaite vraiment donner vie à un enfant dans ce monde-là… Autant de questions qui, une fois entremêlées, sont prétextes à faire surgir une réflexion sur la vie en société, aujourd’hui, dans une ville aussi métissée que Bruxelles.

    Pour interpréter ce drame, les acteurs font preuve d’une remarquable authenticité, grâce à  leurs gestuelles et leurs intonations toujours très justes. La mise en scène est plutôt sobre, mis à part certains interludes musicaux de qualité douteuse. Quant au contenu, il est somme toute très inégal. En plus d’être souvent prévisibles, les réflexions éthiques suggérées par la pièce font l’effet d’une tempête dans un verre d’eau. A moins que l’on aille au théâtre pour s’éduquer, nous n’avons guère besoin d’assister à pratiquement deux heures de représentation pour en arriver à des généralités sur la nécessité d’apprendre à vivre en harmonie, peu importe notre couleur de peau et nos difficultés quotidiennes.

    Ivan Sculier
    Ivan Sculier
    Journaliste du Suricate Magazine

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