Les 7 mercenaires
d’Antoine Fuqua
Western
Avec Denzel Washington, Chris Pratt, Ethan Hawke, Vincent D’Onofrio, Byung-Hun Lee
Sorti le 28 septembre 2016
Si l’on peut toujours se poser la question de l’utilité d’un remake, celui des Sept mercenaires – film de John Sturges datant de 1960, lui-même inspiré des Sept samouraïs d’Akira Kurosawa – ne sort pas de nulle part. On pouvait en effet s’attendre à ce que la voie ouverte par Tarantino avec Django Unchained et plus récemment avec Les Huit Salopards soit assez vite empruntée par le cinéma commercial.
C’est Antoine Fuqua – réalisateur entre autres de Training Day, Le Roi Arthur ou encore The Equalizer – qui se voit confié les rênes de ce qui est clairement envisagé comme un spectacle, un blockbuster dans lequel le côté film de groupe et les morceaux de bravoure l’emportent sur la partie western et tout ce qu’elle peut convoquer comme mythologie.
La prémisse est plus ou moins la même que pour les films de Sturges et de Kurosawa : la petite ville de Rose Creek, à la merci d’un industriel sans scrupules et de sa clique de criminels, décide d’engager une bande de chasseurs de primes, tueurs à gages et hors-la-loi en tous genres pour les délivrer de cette emprise. Chacun motivé par des raisons différentes, les sept mercenaires se préparent ensemble à la confrontation finale.
Si la version de 1960 était un western classique qui ne débordait pas trop du cadre hollywoodien de son époque, cette nouvelle version s’inscrit également dans l’ère du temps et dans les codes du blockbuster actuel. C’est ainsi que l’on a plus souvent l’impression de se trouver devant une sorte de « buddy-movie » géant – pas à deux, mais à sept – dans lequel chacun a droit à son bon mot et son petit quart d’heure de gloire, que devant un western en bonne et due forme.
L’habillage westernien du film tient d’ailleurs plus de la parodie ou du pastiche que d’un véritable hommage au genre, et tend probablement plus à résonner avec les récents films de Tarantino qu’avec les films de l’âge d’or dans l’esprit d’un public cible très large et très peu cinéphile.
Mais puisque les emprunts esthétiques à Tarantino sont à peine voilés, il faut tout de même pointer la différence majeure qui existe entre ce film-ci et ses modèles apparents : là où Tarantino s’empare du genre pour le faire entrer en dialogue avec l’Histoire des États-Unis et celle du cinéma, Les 7 mercenaires va presque jusqu’à nier le contexte et la culture dans laquelle il baigne.
Alors que Jamie Foxx dans Django Unchained ou Samuel L. Jackson dans Les Huits Salopards sont des cow-boys noirs revendiqués comme tels, le Denzel Washington de ce film-ci se voit presque nier son identité et n’apparaît que comme un héros providentiel qui ne s’inscrira jamais dans une réalité historique concrète. L’hypocrisie est telle que, pour évoquer l’histoire du racisme aux États-Unis, on préférera convoquer un personnage de coréen déporté et méprisé, histoire de bien noyer le poisson.
Le personnage de Denzel Washington n’est donc pas emblématique d’une mémoire collective, d’une souffrance historique. Par contre, il devient petit-à-petit le porte-drapeau d’une morale chrétienne très droitière – une main sur la Bible et l’autre sur le Colt -, une sorte de tueur-prêtre qui ne manque pas de confesser ses ennemis avant de leur donner la mort. L’air de rien, le film a choisi son camp idéologique.