Edgar ou la difficulté de croire ses sources

Scénario : Mathieu Sapin
Dessin : Mathieu Sapin
Éditeur : Dargaud
Sortie : 06 octobre 2023
Genre : Roman graphique

Spécialiste du reportage en bandes dessinées, Mathieu Sapin s’est intéressé à la politique dans Campagne présidentielle, Le Château, Comédie française et encore récemment Carnets de Campagne, un récit à 6 mains. Dans Edgar, il poursuit dans la même veine documentaire mais en s’intéressant cette fois-ci à un membre de sa famille, Edgar, un personnage que certains pourraient classer dans la catégorie des affabulateurs.

Qui est Edgar ? Un septuagénaire portugais qui aura connu mille vies, farouche marxiste, résistant sous la dictature de Salazar, agent secret, déserteur, descendant direct du duc de Wellington… Conteur hors pair et historien intarissable – à défaut d’être orthodoxe – il trouble parfois la frontière entre le vrai et le faux. Mais comme le hasard fait bien les choses, Edgar est aussi le beau-père de Mathieu Sapin. Et qui de mieux pour nous faire découvrir ce truculent personnage qui commence le récit en disant à son beau-fils : en te disant la vérité, je te trompe?

Même  si cette histoire-ci semble plus personnelle que les précédentes, Mathieu Sapin reste néanmoins dans le domaine politique avec Edgar. Car si on peut douter que son beau-père ait vécu toutes ces aventures, grâce à lui, c’est un demi-siècle d’histoire contemporaine portugaise que l’on évoque, plutôt du côté des coulisses, comme toute l’œuvre de Mathieu Sapin.

Outre cette page d’histoire, la véritable question de cet ouvrage est celui du traitement des faits historiques, de la difficulté d’en vérifier l’exactitude et de connaître les biais attachés à l’auteur de cette retranscription. Tout le monde est faillible, possède ses propres convictions, appréhende la réalité selon un certain prisme, et par conséquent, ce n’est qu’en recoupant les nombreux témoignages que l’on peut brosser l’ébauche d’un tableau complet d’une situation donnée.

Même si l’attitude du personnage principal pourrait en irriter certains, ce roman graphique reste à recommander tant sa portée est universelle et s’inscrit bien dans le processus entamé par l’auteur il y a de nombreuses années avec ses premières œuvres à caractère politique.