De la Compagnie du Vendredi, d’après Maxime Gorki, mise en scène de Christophe Sermet, avec Claire Bodson, Iacopo Bruno, Vanessa Compagnucci, Gwendoline Gauthier, Francesco Italiano, Phillippe Jeusette, Sarah Lefèvre, Gaetan Lejeune, Yannick Renier et Consolate Sipérius. Du 2 au 13 avril 2019 au Théâtre des Martyrs. Crédit photo : Marc Debelle
Christophe Sermet , après Vania ! d’Anton Tchekov monté en 2014, s’est de nouveau plongé dans la dramaturgie russe avec Les Enfants du soleil, écrit en 1905, par Maxime Gorki. Gorki est un auteur russe, figure de proue du mouvement littéraire du réalisme socialiste qui a soutenu de diverses manières le bolchévisme et ses révolutionnaires.
Pour accueillir la pièce et les personnages, le metteur en scène a opté pour un espace hybride ; à la fois lieu clos et ouvert, à la fois avant scène et coulisse, l’espace est multiple et offre des perspectives de jeu intéressantes et surprenantes. A l’extérieur la révolution gronde et le choléra avance à petit pas mais l’intérieure semble hermétique à tout cela. Les personnages sont névrosés jusqu’à la moelle, perdus dans des questionnements existentiels, si loin de la réalité violente du dehors, si déconnectés de la lutte des classes, dans un ailleurs fait d’idéaux et de rêve de beauté et de grandeur.
Pavel Prottasov est un scientifique de la vie, il va la chercher dans l’infiniment grand (les astres) et dans l’infiniment petits (les molécules), il veut la trouver, la comprendre et la créer. Autour de lui, personne ne lui offre la concentration nécessaire à son grand œuvre, cette maison est sans cesse dans le mouvement, dans l’expression des sentiments, dans la recherche d’un plus beau, d’un meilleur.
Il y a Melania à l’âme salie et brisée qui cherche une sorte de rédemption en aimant Prottasov, espérant laver son passé en étant plus proche de cet être solaire et innocent. Il y a Liza, la sœur de Pavel, Cassandre funeste qui seule semble pressentir l’ampleur de la révolution qui arrive, tombant dans l’hystérie et essayant de briser les murs que les gens autour d’elle se construisent. Il y a aussi Iegor qui imprègne de sa présence inculte la maison et ses habitants, incursion du peuple dans un monde de bourgeois.
Cette pièce est drôle malgré le drame qui la traverse. Dans sa forme, elle est électrique et riche, servie par des acteurs éblouissants, et dans son fond, elle est explosive et mélancolique ; pièce au mécanisme précis et implacable. En conclusion, Les Enfants du soleil c’est un aquarium qui se fissure, qui entraîne dans ses eaux et se déverse sur le spectateur hagard