C’est l’histoire d’une rencontre entre deux batteurs talentueux. Deux rockeurs déjantés qui vont avoir une idée de génie, celle de s’associer pour créer un concept unique mélangeant batterie et humour: les Fills Monkey. Nous sommes allé à la rencontre de Sébastien Rimbaud et Yann Coste lors de leur passage à Bruxelles pour le festival Juste Pour Rire.
Bonjour, Merci pour cet interview ! Votre spectacle est vraiment original et hilarant !
Comment avez-vous commencé cette aventure ?
Sébastien: Nous nous sommes rencontré au début des années 2000. A l’époque, on jouait dans divers groupes de rock. et comme on faisait partie du même réseau dans la région de Lyon, on se croisait souvent lors de festivals ou de concerts. On se connaissait sans avoir joué ensemble. En 2005, une marque de cymbales a choisi d’endosser deux batteurs, et la chance a fait que c’est tombé sur nous deux.
C’est ça qui nous a réunis autour de ce projet. Nous avons donc commencé à faire des démos de batterie pour cette marque. Et on s’est dit que plutôt que de faire ça de façon individuelle, ce serait bien de le faire en commun. C’est ainsi que s’est créé Fills Monkey.
Yann: Il faut savoir que notre premier métier, c’était batteurs pour plusieurs groupes. Et il nous arrivait souvent d’assister à des démonstrations de batterie où l’on s’ennuyait souvent parce que les batteurs sont là pour déballer leur technique et montrer qu’ils savent jouer très vite et très bien. On s’est dit qu’on allait proposer quelque chose d’un peu plus ludique.
Les premières fois, on a essayé de placer quelques petits gags sans trop y croire. Et finalement, c’est ça que les gens ont retenu de notre prestation. Ça nous a motivé pour faire un petit spectacle (au début c’était un quart d’heure) basé autour du rythme mais qui soit digeste pour tout un chacun.
Sébastien: On a été les premiers surpris car cette pratique qui était réservée aux batteurs s’est nettement étendue et touche maintenant un public très large. On parle souvent des 7 à 77 ans. Mais en ce qui concerne notre public, il faut plutôt parler de 16 mois (on a battu notre record la semaine passée) à 96 ans. On a donc été agréablement surpris car on ne s’attendait pas à ce que ça touche un public aussi large.
Yann: Nous avons aussi découvert que le fait de ne pas parler pendant le spectacle permet d’exporter celui-ci dans plein d’autres pays.
Au début, on a inséré quelques phrases dans le spectacle, et on a fini par les gommer petit à petit car on s’est aperçu que c’était plus efficace de garder la langue rythmique universelle (tam taka boum boum ,…) pour faire passer une émotion.
Comment composez-vous ce spectacle? Est-ce que vous le faites évoluer ?
Yann: Dans l’ensemble, c’est assez écrit. Mais il est vrai que le spectacle a évolué d’après les retours que l’on a reçu du public. Nous avons pris note de tout ce que les gens nous disaient et nous avons essayé d’en prendre compte. C’est un spectacle qui est fait avec et pour le public.
Sébastien: En ce qui concerne la composition pure et dure, tout est prétexte à créer. Nous avons commencé avec des batteries parce que c’est notre instrument au départ. Puis progressivement, nous nous sommes tourné vers d’autres choses. Nous avons trouvé des balles de tennis qui trainaient, on a donc utilisé celles-ci et appris à jongler avec et à les maîtriser.
Yann: On a aussi trouvé des bâtons d’éveil (qu’on appelle des « bâtons magiques » entre nous) et qui peuvent produire des notes et avec lesquels on peut faire des mélodies. Il y a beaucoup d’objets de la vie quotidienne qui permettent de faire des percussions.
Ce qui nous motive, c’est la performance. On aime repousser les limites et faire des choses très techniques. Mais il faut que cela paraisse « con » et ludique aux yeux du public. On aime beaucoup ce genre d’humour. Nous sommes des bosseurs, on travaille très dur mais il faut que cela ne se voit pas. On prend un objet du quotidien et on le détourne pour que cela soit ludique. C’est ça qui est intéressant.
Votre spectacle est donc assez écrit et laisse assez peu de place à l’erreur. Que faites-vous lorsque cela arrive malgré tout ?
Yann: Comme ce spectacle est assez technique, il y a pas mal de situations qui sont plus délicates. Par exemple, lorsque les balles de tennis rebondissent de façon aléatoire ou que l’on fait voler les baguettes, il arrive forcément un moment où une baguette tombe par terre. Mais comme nos personnages sont « cons » et bien on joue aussi avec cela. Et donc, quand on est con, on a le droit de faire tomber ses baguettes. (rires)
Parfois, les gens pensent que nous le faisons exprès et nous disent de garder ce genre de moments. Mais bien évidemment, n’est pas toujours facile à reproduire. Ceci dit, comme le rythme est assez soutenu, les erreurs sont très vites oubliées.
Sébastien: Le fait d’avoir un spectacle très écrit fait que lorsqu’un moment inattendu comme celui-là se produit, ça laisse place à l’improvisation. On sait que tôt ou tard on pourra de toute manière revenir sur les rails et continuer. On aime aussi jouer avec les réactions du public. Il participe beaucoup et cela nous permet de faire quelque chose où tout est permis.
Vous jouez principalement dans des théâtres. Pourquoi ce choix ?
Sébastien: Nous venons tous les deux du milieu du Rock et nous avons joué dans des salles de concerts. Au début on étaient tout seuls à mener ce projet. On a donc contacté les gens que l’on connaissait dans le réseau Rock. Puis on a pris conscience qu’il y avait une dimension théâtrale dans ce spectacle. Et donc, on a développé cela avec un metteur en scène. Nous avons commencé alors à faire divers festivals théâtraux. Le premier que l’on a fait c’était le Zoofest. Ca a très bien fonctionné car on est devenus la révélation du festival. C’était incroyable pour nous car on y allait par la petite porte et on se demandant si ça allait plaire.
Et en l’espace de deux semaines, on nous a offert l’opportunité de se produire dans de plus grandes salles, de faire des promotions à la télévision, à la radio ou de jouer aussi dans de gros festivals. On prend beaucoup de plaisir en jouant dans des théâtres, mais on ne veut pas perdre la scène Rock qui est notre premier amour.
Yann: Au départ, on a accepté un peu de tout en jouant devant des publics très jeunes ou très âgés. On s’est aussi produits dans la rue ou dans des prisons. Et le public a toujours eu de très bonnes réactions. On aime donc les théâtres pour la qualité d’écoute. Mais ce serait trop facile de se limiter à cela.
On aime varier les lieux. D’ailleurs nous avons fait des vidéos dans le métro et dans la Tour Eiffel parce qu’on aime aussi aller au contact des gens et faire quelque chose qui change leur quotidien.
Avez-vous remarqué de grandes différences entre les publics ?
Yann: La première différence entre les deux milieux, c’est qu’en théâtre, quand les lumières s’éteignent, le public se tait. Alors qu’en musique, c’est alors que les gens hurlent! (rires)
Disons que l’on a vraiment tous types de réactions. Les gens ne réagissent pas de la même façon partout, ne rient pas aux mêmes endroits. On doit aussi adapter le show à la situation. Quand on joue dans une grande salle, il faut grossir les traits. On s’est retrouvés dans un festival électro où le public était plutôt composés de jeunes imbibés d’alcool qui criaient. Là, bien entendu on a fait quelque chose de plus rythmé et rock n’ roll que dans des petites salles où l’on pouvait prendre le temps d’amener les choses avec douceur.
On a toujours une trame à suivre, mais à côté de ça, ce spectacle reste quelque chose de vivant et qui s’adapte selon les situations.
Est-ce que vous voulez transmettre votre passion par le biais de ce spectacle?
Yann: Oui, il est certain que cela nous fait toujours plaisir en tant que batteurs de rencontrer des jeunes qui veulent apprendre la musique après nous avoir vus. Mais le message principal c’est plutôt: Venez passer un bon moment avec nous. Avec trois fois rien, il y a moyen de faire tellement de choses.
A propos des moyens mis à votre disposition, votre kit de batterie est assez impressionnant. Est-ce que certaines personnes sont perplexes en voyant votre matériel ?
Sébastien: Il est vrai que cela peut faire penser aux batteurs comme Portnoy qui ont un milliard de fûts et de cymbales ! Nous, on est des demi-Portnoy en quelque sorte ! (rires)
Yann: C’est un vrai défis de faire un spectacle avec deux batteurs qui soit digeste. Au début du premier morceau, les gens redoutent parfois le moment où ils vont s’ennuyer. On arrive sur scène en se présentant d’abord comme batteurs. On maîtrise notre instrument, mais on veut les emmener ailleurs. Le public s’ennuie souvent lors des solos de batterie et fini par ne plus écouter. Ce qui est intéressant dans ce qu’on propose, c’est que l’on commence comme cela en jouant de la batterie. Puis, arrive un moment où l’on bascule et on propose alors autre chose en plus.
Avez-vous des projets concernant la musique ou d’autres choses que vous aimeriez faire ?
Sébastien: Pour être honnête, ce spectacle a eu un succès qui a largement dépassé nos espérances. On parle actuellement de tournée mondiale, de dates bloquées à long terme, …
Nous allons donc continuer pendant quelques années jusqu’à ce que le public et nous-mêmes soyons las de ce spectacle. Après, nous ferons une pause le temps de réécrire un nouveau show.
Merci beaucoup pour cette interview et à très bientôt !
Merci à toi!
Ne ratez pas les Fills Monkey au Théâtre 140 ce 3 mai dans le cadre du festival Juste Pour Rire !